Éléments essentiels de la mobilisation des connaissances pour la mise à l'échelle d'une innovation éducative menée par des jeunes

Par: Lydia Wilbard,Sandra Spence Posted: 23 juin 2023

Dans cette série de blogues, nous mettons en lumière les leçons tirées des projets de recherche appliquée sur le positionnement des données probantes en vue de leur utilisation pour la mobilisation des connaissances dans le cadre du Partage de connaissances et d'innovations du Partenariat mondial pour l'éducation. Consultez les autres blogues de cette série ici.

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Source: CAMFED/Kumi Media

La mobilisation des connaissances pour la mise à l'échelle est gratifiante, en particulier lorsqu'elle rassemble des partenaires spécialistes qui apportent une vision tous azimuts de l'innovation, qu'elle leur confie le soin de recueillir activement les renseignements dont ils et elles ont besoin sur le terrain et qu'elle leur offre des possibilités et des plateformes pour échanger des points de vue dans des contextes différents afin de stimuler la réflexion créative.

Le Partage de connaissances et d'innovations (KIX) du Partenariat mondial pour l'éducation (GPE), une initiative conjointe avec le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) du Canada, aide la CAMFED à étudier, avec des partenaires gouvernementaux, la possibilité d'étendre un programme de soutien social et de mentorat dirigé par des jeunes afin d'améliorer la qualité de l'éducation des filles marginalisées en Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe, au moyen de la recherche appliquée. Ensemble, nous examinons la pertinence du modèle des guides de l'apprenante pour la réalisation des objectifs nationaux respectifs visant à améliorer l'équité de l'éducation et les occasions postscolaires pour les jeunes marginalisés. Les guides de l'apprenante sont des jeunes femmes qui se portent volontaires pour retourner dans leurs écoles secondaires locales afin d'offrir des cours structurés de préparation à la vie active, d'offrir un mentorat individuel et un modèle, et de créer des liens entre l'école et la collectivité au moyen de visites à domicile afin d'améliorer l'apprentissage et de réduire l'abandon scolaire.

La mobilisation des connaissances est essentielle pour ce projet de recherche participative innovant. Ce que nous avons appris, c'est qu'en créant des équipes de parties prenantes bien définies et en les faisant participer à des processus actifs et immersifs, la mobilisation des connaissances devient un processus continu et génératif. Elle fait progresser le processus de mise à l’échelle en favorisant la collecte de données et la compréhension de l'adaptation potentielle d'une manière adaptée au contexte. Ce processus a entraîné les partenaires dans un cheminement de 12 à 18 mois, depuis la découverte du programme des guides de l'apprenante jusqu'à la discussion sur les moyens pratiques de l'intégrer dans les structures et les processus gouvernementaux existants dans leurs pays respectifs.

Réunir les bonnes personnes

Des comités de mise à l'échelle ont été créés dans chacun des trois pays dans lesquels le projet examine la mise à l'échelle au moyen d'un partenariat gouvernemental. Ces comités réunissent des spécialistes aux rôles bien définis qui, au cours de réunions régulières et de visites sur place, s'informent, débattent et explorent les éléments du programme des guides de l'apprenante et son potentiel dans leurs contextes respectifs.

Depuis sa création en 1993, la CAMFED s'est largement associée aux collectivités pour mettre en œuvre des programmes équitables d'accès à l'éducation et d'apprentissage, en particulier pour les filles. Nous travaillons en partenariat avec des comités au niveau des écoles, de la collectivité et du district, qui accomplissent des tâches bien définies. Parallèlement, au niveau national, la CAMFED formalise le soutien réciproque et les obligations avec les ministères concernés au moyen de protocoles d'entente afin d'assurer la continuité du partenariat en cas de changement de direction politique. Nous avons également créé des comités consultatifs nationaux afin de recueillir les conseils de responsables gouvernementaux au niveau national pour nos programmes d'éducation.

Les comités de mise à l'échelle s'appuient sur ces principes de partenariat et sur nos comités consultatifs nationaux. Au début de notre projet, la schématisation des parties prenantes nous a permis d'envisager un nouvel éventail de contributeurs potentiels possédant une expertise particulière au processus d'extension du programme des guides de l'apprenante. Du côté du gouvernement, nous avions besoin à la fois de décideurs et de décideuses et de spécialistes techniques. Par ailleurs, le programme des guides de l'apprenante étant multisectoriel (éducation, jeunesse et sexospécificité), nous avons dû faire appel à divers ministères pour mobiliser tout le potentiel synergique de leurs mandats. La contextualisation de la cartographie était importante, car les responsabilités de ces secteurs sont détenues par des structures (ministères, départements ou unités) et des positions très différentes au sein de chaque pays. Par ailleurs, la recherche d'une certaine expertise technique nous a obligés à envisager d'autres ministères. Par exemple, la Tanzania Institution of Education fournit des conseillers et des conseillères pour l'adaptation des programmes et, en Zambie, la Teaching Service Commission met à disposition des spécialistes pour comprendre la valeur de la formation des guides de l'apprenante et de l'accréditation potentielle.

Avec de nombreuses organisations non gouvernementales contribuant à l'espace éducatif, la CAMFED a également reconnu la valeur stratégique de consulter des représentants d'organisations et de coalitions de la société civile qui pourraient apporter leurs points de vue et aider à conduire des changements systémiques à grande échelle et à permettre la mise à l'échelle. Par exemple, le coordonnateur du Tanzania Education Network en est membre.

Les responsables de la mise en œuvre en première ligne constituaient la troisième catégorie clé de membres des comités de mise à l'échelle. Il s'agit notamment de responsables de l'éducation au niveau du district et d'autres fonctionnaires, de directeurs et directrices et d'enseignants et d'enseignantes d'écoles, et de guides de l'apprenante représentant à la fois les jeunes et la communauté. Ils et elles apportent une connaissance pratique de la mise en œuvre du programme ainsi que des nuances contextuelles de la communité.

Collecte de renseignements pour garantir la pertinence et la propriété des données

Une fois les structures des comités de mise à l'échelle en place, le processus de collecte des connaissances a été planifié et mis en œuvre. Les membres des comités de mise à l'échelle ont été engagés en tant que chercheurs et chercheuses participatives pour définir activement les renseignements dont ils et elles avaient besoin. Les visites d'écoles ont constitué une activité essentielle de collecte de données et d'apprentissage pour les membres des comités de mise à l'échelle dans tous les pays. Au cours de ces visites, ces personnes ont non seulement observé les guides en action, mais elles ont également interrogé les élèves, les guides de l'apprenante, les enseignants et les enseignantes et les membres de la collectivité à l'aide de questions standardisées qu'elles avaient élaborées avant les visites afin de tenir compte de leurs priorités.

Les membres du comité sont rentrés des visites d'écoles avec la volonté de consolider leurs données et de transmettre leurs connaissances aux membres qui n'ont pas pu participer aux visites. Dans chaque pays, le fait de voir le programme sur le terrain et d'entendre directement parler de son effet de la part de tous ces groupes a confirmé aux partenaires la valeur du programme des guides de l'apprenante. La question fondamentale n'était plus de savoir si le programme des guides de l'apprenante devait être étendu, mais comment il pouvait l'être. Cela a catalysé des discussions et des délibérations plus approfondies sur les possibilités d'adaptation en vue d'une intégration plus large des éléments du programme.

Il s'est avéré difficile de maintenir la participation des membres du comité de mise à l'échelle, notamment en raison de leurs autres engagements professionnels. Des adaptations ont été apportées au processus de collecte de renseignements en limitant le nombre de visites d'écoles (qui nécessitent généralement des déplacements de plusieurs jours dans les zones rurales) lorsque les membres estimaient que suffisamment de renseignements avaient été recueillis. Constatant que les décideurs et décideuses gouvernementales au plus haut niveau n'étaient pas toujours disponibles pour participer à toutes les réunions, nous leur avons demandé de désigner des représentants et des représentantes qui avaient le temps de participer et qui étaient en mesure à formuler des recommandations directes à l'intention et en provenance des comités de mise à l'échelle. De cette manière, nous pourrions maintenir une boucle de rétroaction ouverte et de haut niveau.

Susciter des recherches approfondies et un enrichissement mutuel des idées

Il est essentiel de créer un environnement qui stimule l'échange de connaissances, l'apprentissage et les nouvelles idées. Une réunion régionale de deux jours organisée par la CAMFED Tanzanie en novembre 2022 a mis en lumière cette exigence. Elle a rassemblé 77 membres de comités de mise à l'échelle de Tanzanie, de Zambie et du Zimbabwe, des guides de l'apprenante, des étudiants et des étudiantes et des chercheurs et des chercheuses de projets.

L'objectif principal de la réunion était de libérer l'expertise et les connaissances acquises par les comités de mise à l'échelle et d'apprendre par l'échange et la recherche approfondie. La structuration de l'ordre du jour a été un défi. Nous avions beaucoup à faire, mais nous ne pouvions pas exiger des membres bénévoles de notre comité de mise à l'échelle qu'ils et elles consacrent beaucoup de temps à la préparation de l'événement. C'est pourquoi, le premier jour, le personnel de la CAMFED et les partenaires de recherche ont préparé le terrain afin de créer une compréhension commune grâce à de courtes présentations sur le processus de recherche et les données recueillies à ce jour.

La deuxième journée a été conçue pour être prise en charge et dirigée par les membres du comité de mise à l'échelle, en les faisant passer en mode de participation active. Les participants et les participantes de différents pays partageant une expertise commune se sont réunis en groupes de travail afin d'examiner et de débattre des questions suivantes : où pensez-vous que le programme des guides de l'apprenante apportera une valeur ajoutée au système éducatif? Quelles sont vos recommandations en tant que gouvernement pour améliorer le programme des guides de l'apprenante? Comment tirer parti des structures existantes et adapter le programme des guides de l'apprenante? Comment voyez-vous votre rôle potentiel en tant que gouvernement ou partie prenante dans le développement du programme des guides de l'apprenante?

Les membres du comité de mise à l'échelle se sont engagés avec énergie, démontrant leur profonde compréhension du programme et l'appropriation des données qu'ils avaient recueillies. Ils et elles ont discuté des similitudes et des différences entre les trois pays et ont échangé des suggestions pratiques pour adapter les approches des éléments du programme des guides de l'apprenante à leurs différents contextes nationaux.

Le parcours de mise à l'échelle est long et complexe, mais l'apprentissage et les progrès continus sont réalisables grâce à des structures solides et à une facilitation active de toutes les dimensions de la mobilisation des connaissances.