Le programme scolaire basée sur les compétences : Expériences de la communauté de pratique du pôle KIX Afrique 19

Par: Gabriel Mekbib Posted: 12 décembre 2022
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Source: UNESCOIICBA

 

Un récent rapport de la Banque mondiale a reconnu la résilience du système d’éducation kenyan, qui a su résister aux turbulences provoquées par la pandémie mondiale. L’amélioration des résultats d’apprentissage des élèves est en raison de plusieurs réformes entreprises avant la pandémie, y compris le perfectionnement des enseignants, les politiques relatives aux manuels scolaires et la gestion. Le rapport cite aussi l’amélioration des évaluations notées en mathématiques entre 2015 et 2021.

Le rapport indique également que la mise en œuvre par le Kenya d’un programme national d’éducation basée sur les compétences (EBC) en 2017 a favorisé l’amélioration des résultats d’apprentissage. C’est dans ce cadre prometteur d’une approche centrée sur l’élève que les pays membres du pôle KIX Afrique 19 ont formé une communauté de pratique (CdP) consacrée à l’EBC qui a eu lieu de juin à juillet 2022.

66 personnes de quatorze pays du pôle KIX Afrique 19 ont participé à huit séances virtuelles de deux heures pour échanger sur leurs expériences. Complétées par des centaines de messages sur WhatsApp, ces conversations donnent un aperçu de la manière dont les éducatrices et éducateurs de la région abordent la question de l’EBC.

Animées par des formatrices et formateurs d’enseignants et des conceptrices et concepteurs de programmes d’études de l’Institut tanzanien de l’éducation (TIE), les séances ont permis de compléter et d’étendre la CdP menée par l’Africa Curriculum Association en 2021. Les participantes et participants se sont entretenus avec des spécialistes du TIE sur des éléments spécifiques de l’EBC, puis se sont penchés sur une étude spécifique de cas nationale.

Définir les approches pédagogiques du programme d’EBC

Comment les participantes et participants ont-ils défini le programme d’EBC? Chrispen Mawarire, chargé de recherche en éducation au ministère de l’Enseignement primaire et secondaire du Zimbabwe, a dit que l’EBC est basé sur le développement des compétences des élèves qui leur permettront de survivre au sein de leur communauté. Olive Mbuthi, consultante en éducation au Kenya, a ajouté que « la compétence ne se limite pas aux travaux pratiques; il s’agit également d’organiser des expériences d’apprentissage auxquelles l’élève participe davantage – il ou elle pose les questions, explore et trouve les réponses ». Les participants et participantes ont généralement convenu que les approches du programme d’EBC offraient des expériences d’apprentissage de meilleure qualité que les méthodes d’enseignement plus traditionnelles axées sur les résultats.

Cependant, des critiques étayées de la mise en œuvre du programme d’EBC ont souligné la difficulté de mettre en œuvre efficacement le programme. Selon ces critiques, le programme d’EBC comporte des coûts d’apprentissage plus élevés et nécessite une implication constante des parents – ce qui n’est pas nécessairement à la portée de tous. Plusieurs pays d'Afrique ont déjà mis en œuvre ou s'apprêtent à adapter l’EBC. Les discussions sur la mise en œuvre du programme d’EBC se sont concentrées sur des approches individualisées ou à l’échelle de chaque établissement scolaire.

Le rôle des cadres dans les approches d’EBC

Les premières séances ont visé d’abord à cartographier les compétences essentielles et à mettre en œuvre le programme d’EBC. S’agissant du rôle des cadres dans le programme d’EBC, Blessing Chabikwa, chargée de recherche en éducation au ministère zimbabwéen de l’Enseignement primaire et secondaire – Développement des programmes et services techniques, a déclaré que « les plans de cours doivent indiquer le concept à couvrir, les objectifs du cours, la compétence à développer, les méthodes à utiliser, les ressources et les médias, ainsi que le temps ». Fixon Mtelesi, du TIE, a ajouté que « pour le programme d’EBC, il n’est peut-être pas nécessaire de prévoir les activités des enseignants et enseignantes, mais plutôt celles des apprenants et apprenantes ».

Reconnaissant que « la plupart des enseignants et enseignantes ne disposent pas des ressources nécessaires », John Balla, responsable du développement des programmes au ministère de l’Éducation de base et de l’Enseignement secondaire supérieur de Sierra Leone, a souligné qu’ « un programme de cours doit être concis et créer des activités pratiques afin de permettre aux élèves d’appréhender le concept ». De même, l’enseignant ou l’enseignante doit se concentrer sur les élèves. Il faut s’assurer que « les plans de cours comportent des activités que les élèves devraient réaliser à chaque étape », a fait remarquer Nelly Machu, responsable du développement des programmes scolaires au Kenyan Institute of Curriculum Development.

Figure 3Enea Muhando et Fika Mwakabungu du TIE échangent leurs réflexions sur le programme d’EBC/UNESCO

Cependant, une étude de cas approfondie sur le perfectionnement des enseignants et enseignantes a révélé que même si la plupart d’entre eux sont favorables à l’EBC, ils ne disposent souvent pas des compétences et des connaissances nécessaires pour le mettre en œuvre. Conscient de leur rôle essentiel, Stephen Mwashihava, concepteur de programmes d’études au TIE, a fait remarquer que « les enseignants... sont la principale interface entre le programme d’éducation basé sur les compétences, les ‘solutions’ et l’apprentissage des élèves ». Il a déclaré qu’en Tanzanie, les enseignants et enseignantes en formation avaient confiance en leurs capacités à mettre en œuvre le programme d’EBC mais qu'ils avaient du mal à expliquer les concepts de la CBC lors des entretiens. M. Mwashihava a cité d’autres études menées en Zambie et au Kenya, qui ont mis en évidence des lacunes similaires dans les aptitudes à enseigner. Pour pallier ces lacunes, M. Mwashihava a souligné l’importance des programmes de perfectionnement des enseignants et enseignantes, notamment lorsque les ressources sont rares.

Communauté de pratique

Ces milieux qui manquent de moyens sont bien connus de nombreux membres de la CdP. Au fil des huit séances, les participants et participantes ont raconté leurs expériences, de l’intégration des technologies de l’information et de la communication dans le programme d’EBC au rôle de l’apprentissage par l’expérience dans les écoles secondaires. À noter que nombreux participants et participantes à la CdP de l’an dernier ont décidé de renouveler l’expérience et de participer à cette CdP, ce qui témoigne la pertinence du sujet.

Des sondages réalisés après les séances ont révélé que 94 % des participants et participantes ont jugé la CdC comme étant utile et pertinent ou très utile et pertinent. Une participante du Lesotho a en outre indiqué qu’elle prévoyait analyser le programme d’études [de son pays] et l’élaboration des syllabus avec les cadres du programme d’EBC pour déterminer si l’enseignement et l’apprentissage au Lesotho sont conformes aux cadres. La diversité des expériences et des points de vue échangés reflète à la fois les possibilités et les défis liés à l’adoption des approches d’EBC, tout en créant un environnement favorable aux apprenants.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le pôle KIX Afrique 19, nous vous invitons à vous rendre sur notre site Web hébergé sur le site Web de l’IICBA de l’UNESCO et à consulter notre référentiel numérique pour accéder aux ressources utilisées dans le cadre de la CdP sur l’EBC, ainsi que plus de deux cents politiques, études et ressources nationales et régionales sur l’enseignement et l’apprentissage, l’évaluation, l’éducation de la petite enfance, l’égalité entre les sexes et l’inclusion, et la problématique liée aux données dans le domaine de l’éducation.