Étude de cas sur l’éducation de l’UNICEF : Utiliser la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE pour faire progresser le sous-secteur de l’EPE au Libéria

Posted: 17 avril 2023
Par : Joa Keis
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Source: Ministère de l’Éducation, Libéria

Le projet « Intégrer la petite enfance dans la planification sectorielle », soutenu par le Partage de connaissances et d’innovations (KIX) du Partenariat mondial pour l’éducation (GPE), une initiative conjointe avec le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) du Canada, explore le renforcement et l’élargissement de l’intégration de l’EPE dans les processus de planification du secteur de l’éducation par l’utilisation de la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE développée dans le cadre de l’initiative Better Early Learning and Development at Scale (BELDS). Le projet a mobilisé une cohorte de pays (Soudan du Sud, Sierra Leone, Lesotho, Kirghizstan et Tadjikistan) pour tester, adapter et étendre l’utilisation de l’approche BELDS et de la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE. En outre, le projet a cherché à tirer parti de l’expérience de cette cohorte de pays pour étendre l’utilisation de l’approche BELDS et de la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE à d’autres pays du GPE qui s’efforcent d’étayer la politique, la planification et la pratique de l’EPE et à renforcer la capacité des parties prenantes nationales et internationales dans ces processus.

Au Libéria, la loi sur la réforme de l’éducation (ERA) de 2011 a imposé la mise en place d’une éducation de la petite enfance (EPE) dans tout le pays et a souligné la responsabilité du gouvernement dans le renforcement du sous-secteur de l’EPE. Malgré cet engagement politique, l’EPE n’est ni obligatoire ni gratuite dans le pays à ce jour, ce qui crée des obstacles à l’accès équitable aux services d’EPE. La pauvreté des parents peut limiter l’accès de certains enfants, car plus de la moitié (52 %) des services d’EPE au Libéria sont privés et même dans les établissements publics d’EPE, les parents doivent payer des frais d’inscription, de transport et d’uniforme en plus d’une cotisation annuelle (plafonnée à 3 500 LRD, soit environ 22 $ US). Le financement du gouvernement pour le sous-secteur de l’EPE a été limité aux salaires des enseignantes et des enseignants de la fonction publique, ce qui n’incluait que 41 % des enseignantes et des enseignants des établissements publics d’EPE en 2020. Un autre défi de taille auquel est confronté le sous-secteur de l’EPE au Libéria est la question de la scolarisation des enfants trop âgés. En effet, 67 % des élèves de l’EPE ont dépassé l’âge légal, soit la proportion la plus élevée de tous les sous-secteurs de l’éducation. Cela se reflète dans les écarts entre les taux d’inscription brut et net pour l’EPE en 2020 : 128 % contre 58,4 %, respectivement. Ce taux élevé de dépassement s’explique notamment par les pratiques des écoles qui imposent des compétences académiques minimales pour l’entrée en première année, ce qui n’est pas une politique nationale. Les taux élevés de redoublement dans l’éducation de la petite enfance contribuent en outre au problème de la scolarisation des enfants trop âgés qui persiste dans l’ensemble du secteur de l’éducation.

Il était d’un grand intérêt pour le Libéria de relever ces défis dans le sous-secteur de l’éducation et de la formation tout au long de la vie. Pour réduire les taux élevés d’enfants trop âgés tout au long du cycle éducatif, on a décidé que les réformes devaient commencer dès les années d’éducation de la petite enfance. Bien qu’il y ait eu une forte volonté de changement, il a été difficile d’obtenir l’élan nécessaire pour passer au niveau d’engagement suivant. L’une des principales raisons est qu’il n’existe pas de cadre conceptuel commun sur les différences entre l’éducation de la petite enfance et le développement de la petite enfance (DPE) en ce qui concerne les programmes pour la petite enfance, ce qui rend difficile l’examen des questions relatives aux pratiques éducatives dans les premières années de la vie. Grâce aux efforts de mobilisation des connaissances dans le cadre du projet de Partage de connaissances et d’innovations du Partenariat mondial pour l’éducation (GPE-KIX) de l’UNICEF « Intégrer la petite enfance dans la planification sectorielle » et en collaboration avec le bureau régional de l’UNICEF en Afrique occidentale et centrale, le bureau de l’UNICEF au Libéria a été initié à la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE. Il s’agit d’un ensemble d’outils conçus pour aider les pays à élaborer et à intégrer des plans pour le sous-secteur de l’EPE dans des plans et des budgets d’éducation plus larges et à fournir les ressources nécessaires pour traiter ces questions dans le sous-secteur de l’EPE. Le groupe de travail intersectoriel sur le développement de la petite enfance, composé de ministères compétents et d’autres partenaires du développement, a utilisé divers dispositifs de la boîte à outils au cours du processus d’élaboration du plan sectoriel de l’éducation (PSE) pour parvenir à une précision conceptuelle commune concernant les différences entre l’EPE et le développement de la petite enfance et pour définir les domaines prioritaires du sous-secteur de l’EPE à prendre en compte dans le PSE.

Tout d’abord, le groupe de travail intersectoriel sur l’EPE, composé de ministères de tutelle et d’autres partenaires de développement, a examiné le questionnaire d’auto-évaluation. Le questionnaire a aidé le groupe de travail à déterminer les limites de la compréhension des concepts. En effet, la distinction entre l’EPE et le DPE a été précisée dans le contexte national et la compréhension des fondements conceptuels de ces deux notions s’est améliorée. Cette première étape a permis au groupe de travail de préciser que son travail devait se concentrer sur l’EPE plutôt que sur le DPE. Le groupe de travail a aussi utilisé l’outil d’analyse du sous-secteur préprimaire (outil 2.2) pour examiner l’environnement favorable (leadership ministériel, politiques et législation, demande publique, financement) et la fonction essentielle d’un sous-secteur préprimaire efficace (planification et budgétisation, mise en œuvre du programme scolaire, développement de la main-d’œuvre, mobilisation des familles et de la collectivité, assurance de la qualité). Le groupe de travail s’est réuni périodiquement au cours du processus d’analyse du secteur de l’éducation/de développement du PSE pour discuter de ces différents aspects et est parvenu à une série d’éléments qui ont été fournis au ministère de l’Éducation pour l’aider dans l’analyse du secteur de l’éducation et le développement définitif du PSE du Libéria :

  • Il existe une lacune dans les politiques couvrant la tranche d’âge des 5-6 ans, qui, au Libéria, se concentre sur l’éducation préscolaire. Un examen des politiques et des lois actuelles concernant le développement de la petite enfance au Libéria, y compris la politique nationale intersectorielle sur le développement de la petite enfance, la politique d’éducation inclusive du Libéria et le matériel pédagogique (tel que le planificateur de développement de la petite enfance pour les enseignantes et les enseignants) a révélé que ces politiques et ces lois couvraient les tranches d’âge de 0 à 5 ans et de 6 à 8 ans.
  • En ce qui concerne le financement de l’EPE, il faut donner la priorité au financement public et l’EPE ne peut pas être entièrement confiée au secteur privé, comme c’était le cas auparavant. On a aussi souligné la nécessité de disposer d’un budget réel pour l’EPE.
  • Les liens entre l’EPE et les années primaires ont été définis et améliorés. On a notamment abordé les questions du dépassement d’âge et de la préparation à l’école.
  • On a défini le besoin de développement de la main-d’œuvre dans le domaine de l’EPE, comme la nécessité de former des spécialistes dans les instituts de formation des enseignantes et des enseignants en milieu rural (RTTI), établissant ainsi des liens entre le Bureau du développement de la petite enfance et les RTTI.
  • On a aussi défini la nécessité d’une assurance qualité de l’EPE.
  • On a établi la nécessité de réactiver un groupe de travail technique (GTT) de l’EPE pour poursuivre les travaux sur ces questions et faire avancer le programme de l’EPE.

RÉSULTATS

Le plan sectoriel de l’éducation 2022-2027 a été achevé en août 2022 et a souligné l’importance du rôle de l’EPE dans la poursuite du développement éducatif et socio-économique au Libéria. Grâce au travail effectué à l’aide de l’outil d’analyse du sous-secteur préprimaire pour examiner le sous-secteur de l’EPE et aux éléments fournis au ministère de l’Éducation pour l’aider dans l’analyse du secteur de l’éducation et le PSE, des objectifs mesurables pour les cinq prochaines années ont été inclus dans le PSE, tels que la réduction du pourcentage d’enfants trop âgés inscrits dans l’EPE de la base actuelle de 67 % à 20 % d’ici 2027 et la réduction du taux de redoublement de l’EPE de 8 % à 0 %. Le PSE mentionne également la nécessité d’élaborer une politique nationale en matière d’éducation et de formation de la petite enfance afin de combler les lacunes de l’enseignement préscolaire.

La réduction des frais est également une priorité dans le cadre du PSE. Après le Sommet sur la transformation de l’éducation en septembre 2022, on a encouragé le gouvernement du Libéria à accorder plus d’attention au développement du sous-secteur de l’éducation et de la protection de la petite enfance afin de relever certains des défis rencontrés au niveau primaire. Dans le budget de l’année suivante (2023), le gouvernement a subventionné les frais d’inscription à l’EPE à hauteur de 2,5 millions USD, reconnaissant ainsi la nécessité d’améliorer l’accès à l’EPE pour tous les enfants.

LEÇONS APPRISES

  • La boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE est une ressource utile pour catalyser la volonté politique existante en faveur de l’EPE en une action significative et pour générer une dynamique positive pour le sous-secteur. On peut aussi l’utiliser pour inclure les parties prenantes concernées dans le processus de construction d’un consensus et de formulation de solutions adaptées au contexte pour répondre aux besoins prioritaires du sous-secteur de l’éducation et de la formation des jeunes. Au Libéria, l’utilisation de la boîte à outils a permis aux principales parties prenantes de parvenir à une compréhension commune des différences entre le DPE et l’EPE, ce qui leur a permis de cerner les lacunes évidentes dans la couverture politique et d’autres domaines prioritaires dans le sous-secteur de l’EPE.
  • La structure de la boîte à outils permet une certaine souplesse dans son utilisation afin de répondre aux besoins des pays dans leur contexte particulier. Au Libéria, qui en était aux premiers stades de l’élaboration de plans plus concrets en matière d’EPE, la boîte à outils, et plus particulièrement l’outil d’analyse du sous-secteur préprimaire (outil 2.2), a permis aux parties prenantes d’évaluer le sous-secteur de l’EPE dans une optique holistique de « systèmes ».

PROCHAINES ÉTAPES

Le déploiement de l’EPE de manière équitable au Libéria ne fait que commencer. On prévoit actuellement de réactiver le GTT de l’EPE en 2023 et de renforcer ses capacités en matière d’utilisation de la boîte à outils de l’accélérateur de l’EPE, afin de s’assurer que ce qui a été décrit dans le PSE se traduit par des actions, en tirant parti de l’outil de calcul des coûts et d’autres nouvelles ressources dans les sections de mise en œuvre et de suivi de la boîte à outils.

En outre, l’UNICEF et l’UNESCO se sont associés pour fournir un soutien technique au ministère de l’Éducation afin de développer la première politique d’éducation de la petite enfance du Libéria, axée sur la tranche d’âge des 5-6 ans, qui n’est pas suffisamment prise en compte dans les documents actuels de politique de développement de la petite enfance. Comme le définit l’analyse des lacunes mentionnée précédemment, l’absence d’une politique pour guider cette année préscolaire au Libéria a été reconnue comme une importante lacune dans la planification de l’éducation au Libéria, étant donné que les politiques de DPE existantes se concentrent principalement sur les services pour les enfants dans la tranche d’âge 0-5 ans et que les politiques de l’école primaire concernent les enfants dans la tranche d’âge 6-8 ans. Cette nouvelle politique nationale de l’EPE comblera cette lacune et mettra en évidence la forte reconnaissance par le ministère de l’Éducation et le gouvernement du Libéria du sous-secteur de l’EPE dans les plans d’éducation du Libéria.

Pour obtenir plus de renseignements, prière de communiquer avec : Bureau national de l’UNICEF au Libéria : monrovia@unicef.org
© UNICEF, mars 2023